Sociologie des APS L1 STAPS

1ère Partie : Introduction à la sociologie du Sport

  1. Se réaliser par les pratiques et les images du sport : individuation, habitus/hexis, trieb/pulsion, geste/style
  2. Mythes et expériences vécues : les écoles allemandes de sociologie (Heidelberg, Marbourg, Francfort) et la formation d’un corps sportif national.
  3. Réformer la société par l’encadrement des corps sportifs : de la sociologie Leplaysienne à l’école française de sociologie
  4. Les sports comme dispositifs et expérimentations sociales : du pragmatisme à la tradition sociologique de Chicago
  5. Les sociologues et le renouvellement des formes de pratiques sportives (sociologie critique, sociologie marxiste, sociologie relativiste, anthropologie sociale)
  6. Entre détermination de la société, jeux d’acteurs et création sociale : des sports (présentation des principales approches des sociologies des sports issues des STAPS)
  7. Les données sociales des sports en France

Définition :

  • L’individuation : C’est l’ensemble de processus à partir desquels un corps va se former. La société forme avant tout du corps (à travers des sensations, outils de communication). C’est le corps qui permet de se mettre en relation or le corps produit des techniques mais c’est aussi le produit de techniques.
  • Habitus/Hexis : Les techniques corporelle sont une autre forme de language, par la technique du corps (je ne doit pas forcement écrire mais je peut communiquer). Ces techniques de communications corporelle créer des groupes sociaux (sportifs, groupe d’âge) = différents style de vie.
  • Trieb/Pulsion : Au XIXème  siècle, on redécouvre et on peut affirmer que l’Homme est un animal et doit donc satisfaire un nombre de besoins (se nourrir, reproduire…) Ces pulsions s’apprennent chez les animaux comme chez les Hommes par les jeux. Sans les jeux, il n’y a pas de vie possible, ils permettent de s’exciter et se satisfaire (c’est le propre du sport). Le sport selon Norbert Elias consiste à se maintenir en état de surexcitation (D’un côté le propre du sport pour le, sportif c’est l’expression des pulsions agressives (se dépasser) mais il doit être maître de son corps (contrôler sa pulsion et respecter les règles : le fair-play))
  • Gest/Style : Notion hérité de l’esthétique. C’est la signature du sportif qui caractérise le sportif ou le sport. Le sport se caractérise par un style de jeu.

Le sport à des renvoies à des réalités multiples : -Il se pratique dans les institutions et hors-institutions (60%) -Le sport occupe une place prépondérante dans les médias -A coté de la pratique, il y a des récits et des historiens -Le sport se développe dans des espaces virtuelle (1/3 des Jeux vidéos)

  • Le sport est avant tout un ensemble d’histoire qu’on se raconte (90% en parle 🡺 phénomène sociale totale) , 80% jouent à des jeux de sports contre 70% qui en pratiquent. Concurrence à la pratique sportive. Les médias s’intéressent aux sportifs de hauts-niveau sur à peu près tout les domaines sauf le sport.

L’invention de la Sociologie

  • La sociologie est une invention française au début du XIXème siècle (de Saint Simon à Durkhein) dans le contexte d’urbanisation et d’individualisation des modes de vie.
  • Le terme renvoie étymologiquement à l’analyse des manières dont les hommes s’associent, s’assemblent (socius, logos)
  • Cette science humaine s’appuie en particulier sur les événements du XVIIIème  siècle (constitution des Etats Nations et modernité) ainsi que sur les intellectuels de l’époque (Newton, Francis Bacon, Montesquieu, Rousseau)
  • La pensée reste enracinée dans la philosophie grecque (Aristote, Platon, Hérodote)

La genèse de la Sociologie

La science sociale (science des mœurs) émergé à l’issue de trois grandes étapes :

  1. Des théories sociales (1730 à la Révolution Française) interrogeant les deux composantes centrales de la sociologie : interdépendance et différenciation. On interroge la société sur ces unités (Etats, Eglise, communauté) à travers le droit, la morale, l’économie, le politique.*
  2. L’intégration des questions sociales dans une problématique et une méthode scientifique (biologie, médecine, physique, mathématiques)
  3. Une conjoncture historique : les Etats-Nations, l’urbanisation et l’industrialisation des modes de vie.

Quelques Hypothèses

  • R.Nisbet (La tradition sociologique) : La sociologie se constitue à partir de cinq idées essentielles (communauté, autorité, statut, sacré et aliénation) qui fondent les grands paradigmes de la discipline (structure, culture, individualité, processus, développement, fonctions…) 

Communauté : La communauté est une manière ritualisé qui obéit à des règles non affiché où des Hommes s’assemblent autour d’intérêt commun.

Autorité : Emprise qu’une personne exerce sur d’autres personnes.

Statut : Place sociale définit par le pouvoir, l’argent, métier par un rôle qu’occupe une personne. Ce qui permet de nous situer sur une échelle.

Société : C’est un espace, un lieu qui est réservé à un nombre limité d’individu. C’est ce qu’une personne va valoriser.

Aliénation : C’est un rapport de dépendance (à la religion, au travail) qui supprime toutes possibilités de liberté

  • W.Lepenies (Les trois cultures) : Pour exister en tant que discipline, la sociologie doit se frayer un chemin entre science et littérature qui alimentent ses questions et ses méthodes.
  • A.Savoyé (Les débuts de la sociologie empirique) : Dès 1800 la science sociale répond à une demande institutionnelle d’analyse des conditions de vie et des expériences sociales. La discipline se veut avant tout pratique et utile dans sa genèse.

Influences philosophiques des problèmes sociaux

Rapport de l’Homme au monde dans la médecine hippocratique et la physiognomonie (reprise en 1820 par J.K Lavater)

Dès la fin du XIXème siècle, le rapport d’intériorité et d’extériorité devient un principe fondamental, le corps traduit la manière dont une société est organisée. Le sport, la gymnastique deviennent des éléments indispensables à la formation d’une société.

  • Platon dans la République montre que les expériences (poètes, gymnastes, artistes) sont garantes de la cité et de ses limites.
  • Aristote invente le terme « hexis » (Ethique à Nicomaque) pour désigner une « disposition corporelle qui peut avoir pour origine la nature ou la coutume »

La société est organisée par les vertus

  • Saint Thomas d’Aquin utilise le mot « individuation » pour désigner l’être « liberté des rôles (persona) et des images inconsciente » [réalisation de soi]
  • Voltaire reprend à la physique le mot « pulsus » qui désigne alors la propagation du mouvement, l’élan vital [Trieb]
  • La rhétorique s’attache au style, « manière personnelle d’agir, individuelle de s’exprimer (XIIIème – XVème siècle)

La sociologie émerge au XIXème  siècle, elle répond à de nouvelle angoisse (comment existé dans un monde où tout est remis à plat ?, Comment s’adapter à un mode de vie nouveau travailler par la révolution industrielle et l’émergence des grandes villes ?, comment s’adapter dans ce nouveau monde en trouvant un rythme (pulsus) ?) Le sport va répondre à toutes ces questions, le sport permet de satisfaire ses pulsions, se défaire des rôles sociaux, d’imposer sa signature.

Influence Scientifique

-Mathématiques (Laplace, Lavoisier) 🡺 Ecole polytechnique

-Médecine (A.Von Holler)🡺 Ecole de Santé

-Histoire naturelle (Lamerck, Cavier)   🡺 Société d’histoire naturelle

                      SOCIOLOGIE

  • Invention du métier d’entraineur : il empreinte les technique d’élevage des animaux pour les appliquer aux sportifs. On ne parle pas de champion mais de « pur-sang ». 
  • On entraine les hommes de la même manière qu’on entraine les chevaux (présence d’un lièvre qui tire les chevaux) 🡺 pour les hommes on va mettre un autre homme en vélo, puis plus tard un autre homme en moto (souvent le coach)
  • Le régime alimentaire comme pour les animaux, chez les sportifs, on met en place un suivi médical qui s’intéresse au régime alimentaire du sportif, à la transpiration du sportif et à sa fréquence cardiaque.

Ce passage de l’animal à l’homme au niveau des sciences le passage de la zootechnique à l’entrainement sportif. (Inspiré des sciences naturelles).

Influence Littéraires

  • Romantisme :   -Mélancolie et psychologie

-Révolte

-Mélange des sciences de la nature et de la culture

  • Littérature sociologique : -Les psychologies (ex : Zola)

-La physionomie sociale (ex : Balzac et la comédie humaine)

-Les portraits humanistes (ex : Victor Hugo, J.Michelet)

  • Les Utopies : -Presque sociologiques (Rabelais, Voltaire, Fourier)

    -Visionnaires et savants (J.Verne, H.G Wells, H.Hesse, G.Orwell)

🡺 Pour conclure, la sociologie va d’abord s’intéresser aux jeux puis aux loisirs avant d’analyser les sports dans les années 1950 (la sociologie va progresser)

🡺La sociologie va tenter de comprendre les sports de deux manières : 

-L’individualisme méthodologique

-Holisme

Individualisme méthodologique : L’individu, l’homme est traversé par de grands principes (ce n’est jamais l’homme qui choisi, la société choisi pour nous.

Holisme : La seule chose qui existe vraiment, c’est le corps, la chair. La société n’existe pas : c’est quelque chose que fait et défait chaque jour l’individu.

Les précurseurs des Lumières

  • Montesquieu (1689-1755), « L’esprit des lois » ; remet en cause l’idée d’un état de guerre permanent entre les hommes avant le pacte social (Hobbes). Il construit une typologie des lois (positives = législateurs, relations causales, universelles = raisons), des gouvernements, et types sociaux.
  • Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), « Le contrat social » ; pacte scellé entre des hommes libres et maîtres d’eux-mêmes reposant sur une association d’individus qui fondent un pouvoir et reconnaissent qu’ils se soumettent à lui (abandon de liberté, inégalités sociales). C’est l’interdépendance qui fait la société.
  • Adam Smith (1723-1790), « La richesse des nations » ; c’est de l’intérêt particulier que nait un bien commun tel que l’augmentation des richesses. Ce rapport stabilise les positions sociales des hommes pour le bénéfice de tous. La vie sociale est aussi l’expérience, qui conduit à une sympathie (self love).
  • Emmanuel Kant (1724-1804), « Métaphysique des mœurs » ; notre connaissance repose sur le sentir ou la sensibilité (lien entre concept et intuition). La métaphysique des mœurs repose sur la moralité = constitution d’un être rationnel s’appuyant sur les lois et leur représentation (imagination comme le lien entre entendement et sensibilité)

3 principes à retenir :

-Contrat social

-Utilitarisme (intérêt individuel sert le politique)

-La morale

Sieyès inventeur du mot sociologie

  • Emmanuel-Joseph Sieyès (1748-1836), homme d’Eglise, homme politique et essayiste français
  • Publications : Essai sur les privilèges (1788) ; Qu’est-ce que le tiers état ? (1789, texte fondateur de la Révolution française)
  • En 1789, élu député du tiers-état aux Etats généraux, il joue un rôle de premier plan dans les rangs du parti patriote du printemps à l’automne 1789 et propose, le 17 juin 1789, la transformation de la Chambre du Tiers-état en assemblée nationale. Il rédigea le serment du Jeu de Paume et travailla à la rédaction de la Constitution. Nommé consul par Bonaparte, il sera président du Sénat sous l’Empire.
  • Dans un de ses manuscrits inédits, que l’on peut dater des années 1780, Sieyès invente le terme de sociologie 50 ans avant Auguste Comte. Il y traite de « l’organisme social » pour expliciter les « rapports sociaux », de « l’organisation sociale » pour mettre en lumière les institutions. Sa réflexion est placée sous l’égide de l’organisation des mœurs au sein de « l’ordre local ». Cette sociologie a pour finalité la mise en place l’ Etat.

A retenir :         -La sociologie à été inventé en pleine révolution française           -Invention d’une science qui étudie les transformations de la société (empire à la République)         -La sociologie dans sa conception est proche de l’action (trouver des solutions pour mieux gérer la société)                     -Dés le départ, la sociologie en France prend pour modèle la médecine

Des attentes et des évolutions

Les grandes catégories sociologiques (qui reflètent la cohérence de la société) sont issues de demandes institutionnelles :

  • 1800 : l’Etat demande en France une enquête sur les métiers (origine des CSP =Catégorie sociaux professionnel).
  • (1880-1882) : Lois Ferry sur l’école Républicaine (origine des niveaux culturels).
  • 1860 : Ouverture des maternités et premières écoles maternelles, réformes scolaires (Guizot à Bert) (tranches d’âges).
  • 1850 : Transport ferroviaire, découpage administratif et taxes locales (lieux d’habitation).
  • 1880 : Début des mouvements féministes (genre).

Pionniers de la sociologie

  • La volonté de constituer une « physiologie sociale » c’est-à-dire un savoir aussi objectif que les sciences physiques, mais qui porterait sur le domaine des organisations humaines et des relations sociales, émerge au début du XIXème siècle.

L’institutionnalisation de la sociologie

  • 1er enseignement sous le nom de « Eléments de la sociologie » à l’Université du Kansas (USA) en 1890 par Frank Blackmar.
  • 1891 : Création du département d’histoire et sociologie à l’Université du Kansas.
  • 1892 : Création de la première faculté indépendante de Sociologie à l’Université de Chicago dirigée par Albion Small ; création en 1895 par Small de la revue « American Journal of Sociology »
  • 1895 : Création de l’Université de Bordeaux du premier département européen de sociologie par Emile Durkheim fonde en 1896 la revue «  L’Année sociologique ».
  • 1919 : Création d’un département de sociologie à Munich (Allemagne) par Max Weber.
  • 1920 : Florian Znaniecki ouvre un département de sociologie en Pologne (il faut attendre 1945 pour la Grande-Bretagne)
  • 1893 : René Worms fonde l’institut International de Sociologie, auquel succédera en 1949 l’Association Internationale de Sociologie.
  • 1905 : Création de l’American Sociological Association, présidée par Lester Frank Ward

2ème Partie : Réformer la société par l’encadrement des corps sportifs : de la sociologie Leplaysienne à l’école française de sociologie

  • Sport, Educations corporelles, Loisirs sportifs en France comme supports de réforme de la société.

Rencontres entre activités physiques et sociologie en France

  • Les pères fondateurs de la sociologie en France s’intéressent au Contrat social (Rousseau) à l’Esprit des lois (Montesquieu) qui s’appuient sur les changements majeurs de société : défense des intérêts communs, naissance de l’individu moderne.
  • Ces philosophies de la société anticipent une succession de révolutions sociales :              – 1789 (Révolution Française),

– 1848 (2ème République : Suffrage Universel direct),                                                         – 1871 (La Commune)

– 1936 (Front populaire)

– 1968 (Révolution culturelle) au cours desquelles le rapport au corps devient déterminant dans la manière de penser la constitution de la société (intimité, hygiène, éducation corporelles, loisirs…)

Les gymnastiques plus que les sports

Dans la France du XIXème siècle, la constitution de la société ets es réformes sont pensées par la pratique de gymnastiques :

  • La gymnastique militaire : développée par Napoléon Bonaparte et les lycées où l’on forme les officiers (construction de gymnases et apprentissage de la natation, camps d’entrainement, conscription = service militaire) / Importation de la gymnastique d’Amoros, reprise à Grenelle et lors de l’ouverture de l’école de Joinville (1852) /Sociétés de préparation militaire et Bataillons scolaires (1882-1890) / Mise sous tutelle de l’éducation physique par le Ministère de la Guerre jusque dans les années 1930.
  • Les gymnastiques hygiénistes : importation de la gymnastique suédoise (P.H Ling : 1776-1839) en France, qui ajoute aux exercices physiques le régime alimentaire, le massage, la relaxation, les ablutions d’eau ou le sauna / La « suédoise » qui s’intéresse aux grandes fonctions (respiration, circulation, nutrition, innervation) et à la mobilisation rationnelle de tous les muscles est reprise par les médecins, et pense l’appareillage des gymnases (espaliers, bancs, échelles, perche, corde, cheval…) / A partir de 1890, la lutte contre les épidémies (en particulier la tuberculose) devient priorité de l’école / Les médecins fondent l’essentiel des gymnastiques scolaires (P.Tissié, G.Démeny, Bellin du Coteau, Sandoz, et courant néo hippocratique) et dirigent la formation des maîtres d’EP/1920 : grandes campagnes hygiénistes et structuration progressive du plein air.

Sociologiquement, les gymnastiques répondent aux préoccupations sociales des époques :

  • Créer un corps collectif (social et national) par le travail du corps individuel (morphologie, effort, santé)
  • La gymnastique offre une réponse concrète et rapide : former des soldats (grande armée, émeutes sociales, 1870, 2 grandes guerres) ; parer aux maladies et épidémies (cures, choléra, typhus, alcoolisme, syphilis, tuberculose, rachitisme), amélioration des forces vives du travail (champs, usine et taylorisation) ; amélioration de la démographie (mortalité infantile) et des conditions de vie (habitat, jardinage et pleine air) ; contrôler les masses (offre de loisirs et dispositifs).

Les projets sociologiques face aux gymnastiques en France

  • L’organicisme d’Auguste Cote
  • La réforme sociale et la méthode sociale de Frédéric Le Play
  • Les déterminismes corporels du social et l’expressivité vitalise chez J.M. Guyau et G. Tarde
  • De l’éducation à l’école française de sociologie de Durkheim
  • Vers une sociologie des sports à travers le Collège de sociologie (1938).

Auguste Comte (1798-1857) et le positivisme

  • Fonder la sociologie c’est passer de la métaphysique au positivisme : s’appuyer sur les sciences exactes (rationalité) pour définir les lois d’organisation sociale.
  • Selon Auguste Comte, la science est le seul type de pensée efficace pour garantir à la fois l’ordre politique et social et le progrès. L’esprit humain doit renoncer à la « métaphysique », c’est-à-dire à fonder une société sur les notions de liberté et d’égalité, et s’y substituer une science et une morale fondée sur l’observation du progrès historique des sociétés.
  • On passe ainsi de l’âge théorique (religion chrétienne à l’âge métaphysique (Révolution et lumières) à un âge positif (science et progrès). C’est la loi des trois états.
  • Inspire le marxisme et la philosophie de l’histoire.

Frédéric Le Play (1806-1882) et la méthode sociale

  • A partir de 1800, l’Etat français organise des campagnes d’enquêtes sociales afin de mieux connaitre les individus qui composent la société (grande enquête sur les métiers)
  • Une succession d’enquêtes s’intéressent aux conditions sanitaires liées à l’industrialisation et à l’urbanisation : Louis-René Villermé (ouvriers du textile, métallurgie, charbon), Quételet (conscrits et prisonniers), Alexandre Parent Du châtelet (prostitution et hygiène), F. Le Play (statistique générale de la France en 1840, ouvriers européens en 1862, famille en 1871)
  • Frédéric Le Play est mandaté par les institutions politiques pour réaliser un grand nombre d’enquêtes sociales en particuliers sur les métiers, les familles et l’hygiène.
  • Il développe au-delà des statistiques une méthodologie originale : la méthode monographique et l’analyse des budgets. Il met en place une « école des voyages ».
  • Sa sociologie s’appuie sur une volonté de réformer la société : le projet de Paix sociale, qui s’appuie sur deux dimensions que sont la famille et l’état.
  • Le précurseur d’une sociologie empirique : analyse de la société sur le terrain, à vocation pratique. Fait école (ingénieurs du social) avec la Société d’Economie Sociale (SES en 1856) et la revue Etudes sociales.
  • La postérité de Le Play : les comités de Paix sociale, le Musée social (1894) qui développent de nombreuses mesures (HLM, banques de crédit, eaux et forêts, jardins ouvriers, lutte contre la tuberculose, assurances, hygiène…)
  • Les successeurs : E. Demolins (1899 : Ecole des Roches avec G. Beryier – scoutisme), G. Benoît Lévy (1903 : Cités Jardins, 1910 Camping), P. De Coubertin (1888 : Education anglaise, 1889 : USFSA, 1894 : JO).

Emile Durkheim (1858-1917) et l’école française de sociologie

  • La tentative de fondation d’une sociologie française reste prise dans la nébuleuse des sciences sociales : la géographie humaine de Jean Brunhes (collège de France en 1912 et archives de la planète), l’histoire et l’école des Annales (1929 M. Bloch et L. Febvre, EPHE), la psychologie sociale (T. Ribot et G. Tarde, chaire de philosophie moderne du Collège de France), l’anthropologie biologique et culturelle (Paul Rivet, MNHN – Musée de l’Homme).
  • Normalien et agrégé de philosophie, il est nommé chargé de cours de pédagogie et sciences sociales à l’Université de Bordeaux en 1887. Il est en concurrence avec Gabriel Tarde (soutenu par René Worms, fondateur de la Revue internationale de sociologie en 1893 et de l’institut international de sociologie en 1894).
  • 1895 : « Les règles de la méthode sociologique » : le social existe indépendamment de la conscience que nous pouvons en avoir. Le fait social se reconnait au pouvoir de coercition externe qu’il exerce ou est susceptible d’exercer sur les individus, et la présence de ce pouvoir se reconnait à son tour, soit à l’existence de quelques sanctions déterminée, soit à la résistance que le fait oppose à toute entreprise individuelle qui tend à lui faire violence.
  • Règles de la méthode sociologique : il faut traiter des faits sociaux comme des choses. C’est la posture de l’holisme : expliquer les faits sociaux par d’autres faits sociaux, dont les individus ne sont que des vecteurs passifs.
  • 1897 : Le suicide (suicide égoïste, suicide altruiste (certaine personne sont poussé aux suicides par d’autres), suicide anomique (les personnes n’ont plus de repères et deviennent folles), suicide fataliste (on renonce à toutes formes d’espoir, d’espérance dans l’activité dans laquelle on était employé). Dans chaque cas, la désintégration sociale est la cause première véritable).
  • 1898 : L’année sociologique (revue)
  • Durkheim, avec l’appui d’Alfred Espinas (professeur de philosophie) intègre l’université de Bordeaux et est nommé professeur en 1896.
  • Espinas est l’auteur d’une thèse sur les sociétés animales où il s’intéresse notamment à l’impulsion de jeu. Espinas est désigné Président du 2ème congrès national d’éducation physique en 1893, congrès qui le rapproche fortement de Philippe Tissié et la Ligue Girondine d’éducation physique.
  • Espinas présente l’introduction du jeu dans l’éducation comme une nécessité, perspective qui rejoint la théorie qui rejoint la théorie du jeu libre dans les Lendits.
  • Cette relation se prolonge par des comptes-rendus dans la revue l’Année sociologique de Durkheim et la Revue des Jeux scolaires de Tissié.
  • Autour de Durkeim un groupe se forme : M. Mauss, H Hubert, C. Bouglé, P. Fauconnet, M. Halbwachs, F. Simiand… Les analyses sur le jeu font référence aux travaux anglais d’H. Spencer et allemands de Schiller.
  • 1902 : Durkheim nommé professeur à la Sorbonne.
  • 1912 : Création de la chaire de sociologie.

Alfred Espinas et le jeu

  • « Tous les êtres vivants supérieurs jouent dans leur jeune âge (…) Ils miment les actions qui rempliront le cours de la vie adulte (…) bientôt des actions définies remplacent ces mouvements capricieux, et l’on voit se dessiner les préludes de la vie réelle : la fuite, la poursuite, la capture, la bataille, l’amour ».
  • 1899-1900 : Commission parlementaire sur le développement de l’éducation physique et du sport scolaire dans l’enseignement secondaire.
  • 1912 : E. Durkheim publie « Les formes élémentaires de la vie religieuse » (caractères religieux de l’art et des jeux dans les sociétés humaines).

1888-1892 : Philippe Tissié et la Ligue Girondine d’Education Physique

  • Diffusion de la gymnastique suédoise
  • Développement des jeux régionaux
  • Direction de la LNEP (P. Grousset)
  • Création des Lendits
  • Philippe Tissié s’oppose aux développements des jeux sportifs car il préfère que les enfants jouent aux jeux traditionnels.

L’essentiel :

  • Auguste Lecompte : il a une  vision médicale de la société (relation entre le corps individuelle et le corps sociale) C’est en ce sen que Lecompte est l’inventeur de la physiologie sociale.
  • Frédéric Le Play développe une conception paternaliste (pour que la société aille mieux, il faut qu’on encadre les individus qui la compose : 

– L’état français doit être fort stable et directif

– L’autorité parentale dans les familles (il faut la restaurer) 

  • Emile Durkheim fonde l’école française de sociologie à partir de l’approche holiste c’est-à-dire que l’individu est déterminé par les faits sociaux. Il va s’intéresser aux jeux en montrant que le jeu est nécessaire à la socialisation.

Mythes et expériences vécues : les écoles allemandes de sociologie (Heidelberg, Marburg, Francfort) et la formation d’un corps sportif national

Turnen, Sports et Culture du Corps comme supports de constitution de la Nation

Le problème de la gymnastique en Allemagne rejoint la problématique : Comment faire de l’Allemagne un état de nation (unité de l’Allemagne) ? , Comment un ordre social peut-il émerger d’une organisation communautaire ?

Contexte : De l’occupation française à la formation de la Nation allemande 

1792 : envahissement rive gauche du Rhin. 1803 : Empire de Napoléon Bonaparte       1815 : Confédération germanique sous direction empire autrichien (Habsbourg).                     1848 : Deux Allemagnes (Nord (Bismarck) / Sud(Autriche))                                         1871 : Proclamation de l’empire Allemand confronté par la défaite de la France (perte de l’Alsace et de la Lorraine).

La société allemande occupée

  • JG Fichte (1801 discours à la nation allemande). La nation doit se constituer sur une culture (Bildung) commune, autour de deux axes : les mythologies et les pratiques corporelles.
  • Pour Fichte, la Nation se détermine de façon objective par la culture, l’histoire et la langue. Certaines nations ont su conserver au cours des âges la langue originelle de leurs ancêtres, ce sont les « nations-mères ». Le peuple allemand, supposé avoir conservé sa langue depuis l’antiquité est ainsi une de ces nations-mères, par opposition aux nations de langues latines, puisque celles-ci ont oublié le latin antique au bénéfice de nouvelles langues dérivées. Le peuple allemand doit s’unifier. Fichte est ainsi un des premiers penseurs pangermanistes.
  • La Nation s’incarne dans l’Etat, lequel représente et décide « l’orientation de toutes les forces individuelles vers la finalité de l’espèce ». L’état doit être démocratique, assurant la liberté de chacun, et la possibilité pour chacun d’avoir une vie heureuse et profitable, en assurant une distribution équitable des richesses. L’homme « doit travailler sans angoisse, avec plaisir et joie, et avoir du temps de reste pour élever son esprit et son regard au ciel pour la contemplation duquel il est formé… C’est là son droit puisque enfin il est homme ». 

L’unité et l’âme du peuple face à l’occupation

  • 1771 : J.G. Herder – Traité sur l’origine des langues (la culture est spécifique et non déterminée par la nature).
  • 1795 : F. Schiller – Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme (place du jeu).
  • 1803 : E. Kant – Pédagogie (instinct / Discipline)
  • 1810 : L. Jahn – Deutshes Volksthum (tradition populaire allemande) : répartition naturelle du territoire, administration étatique, unité du peuple et de l’Etat, Eglise, éducation populaire. Thème de l’âme du peuple (costume, fêtes, coutumes, livre, vie familiale, ballades patriotiques).

Le Turnen entre résistance et constitution de la Nation

  • 1806 : Après la défaite de léna en Prusse, fondation du Turnen par L.Jahn (1778-1852) pour développer l’amour de la partie par la gymnastique (référence au corps de l’antiquité grecque et à l’esprit Volkish du groupe).
  • 1810 : Association des savants et médecins allemands afin de favoriser les liens entre les fils dispersés de la grande mère patrie.
  • 1818 : 100 organisations de Turnen, 6000 gymnastes en Prusse, 12000 gymnastes en Allemagne.
  • 1848 : Ligue allemande de gymnastique
  • 1862 : 134507 gymnastes
  • 1880 : 170315 gymnastes

L’institutionnalisation de la sociologie allemande

  • Rappel : le questionnement sociologique part d’une intention sociale = l’unité nationale à partir de la fragmentation communautaire. C’est une logique « organiciste » qui est mise en œuvre dans la sociologie : mettre de l’unité en partant du fragmenté et du pluriel de la société.
  • Les concepts d’ « âme du peuple », « culture » (Bildung = culture et image) qui renvoient à la nation sont discutés et élaboré dans le cadre du mouvement romantique.
  • Dans ce contexte historique, l’expérience corporelle vécue et les récits mythiques sont mis en avant (Hegel et son voyage aux Alpes, Stift de Tübingen…)

La constitution de la sociologie allemande

  • Les influences intellectuelles de cette sociologie sont économiques et juridiques (Marx), phénoménologiques (Kant, Hegel). La pensée des intellectuels continue à être fortement dynamisée par le social (promenade, rebellions contestataires, mouvements corporatistes, hygiène sociale…)
  • Parallèlement, les activités physiques se développent à travers le Turnen de Jahn, les activités de plein air liées au mouvement de réforme (Naturisme, Randonnée, Wandervödel, Auberges de Jeunesses…), l’implantation industrielle des sports anglais (vers 1870).
  • Après le tournant philosophique romantique, la sociologie se développe par écoles de pensées (Heidelberg, Marburg, Francfort) dans les années 1860.
  • 1910 : Création de la société de sociologie par Max Weber, Ferdinand Tönnies et Georg Simmel.

La sociologie fondée sur le néo-kantisme

Les grands « courants » sociologiques en Allemagne se développent après 1860, lorque le système philosophique de Hegel s’effondre.

  • Certains philosophes proposent alors de repartir de certains principes de la philosophie de Kant :
  • Redonner de la place à l’expérience vécue dans le processus de connaissance
  • Partir de 3 questions invariantes : (que-puis-je savoir ? Que puis-je-espérer ? Que dois-je faire ?)
  • Ne plus séparer monde sensible et monde intelligible, et revenir sur l’unité de la raison (le contradictoire).

L’esprit d’Heidelberg

  • L’Université d’Heidelberg est fondée en 1803. La pensée scientifique se structure autour du thème de la nationalisation (chimie, sociologie).
  • Wilhelm Dilthey (1833-1936) et Friedrich Schleiermacher (1768-1834) y développent une démarche empiriste (la connaissance se fonde dans l’expérience) et une philosophie vitaliste.
  • Vitalisme : le vivant n’est pas réductible aux lois physico-chimiques. Elle envisage la vie comme la matière animée d’un principe ou force vitale, qui s’ajouterait pour les êtres vivants aux lois de la matière. C’est cette force occulte qui insufflerait la vie à la matière.
  • Herméneutique : ou art d’interpréter les messages. La société serait dynamisée par la quête perpétuelle de mystères à percer dans le langage, fondateurs de sens. L’intuition, le sentiment sont des modes privilégiés dans la constitution de la connaissance.

L’école de Babe (Heidelberg)

  • Autour de W.Windelband et H.Rickert se constitue une école de pensée à partir de 1871.
  • On y développe une philosophie des valeurs en réaction au positivisme des sciences. La philosophie s’intéresse donc au devoir être (la physique à l’être), aux valeurs et jugements de valeurs.
  • L’objectif est de développer une science de l’homme (fondée sur les questions de l’existence et de la liberté), en s’appuyant sur la relation forte entre jugement de fait et jugement de valeur. Ce projet s’appuie sur l’expérience esthétique où se confrontent l’expérience (sensible) et les normes (intelligible) dont la synthèse fonde la raison, les situations ou les objets (ex : Sport et ses règles contradictoires).

Ce courant de pensée influence fortement :

  • L’herméneutique (le sens, la signification) ou les sciences de l’esprit de W.Dilthey
  • La sociologie de Max Weber
  • La philosophie vitalisme de Georg Simmel
  • La philosophie de l’histoire de Benedetto Croce

Il s’agit également de fonder les sciences de la culture (dont la sociologie) face aux sciences de la nature (physique et biologie) –méthodes qualitative face à la démarche expérimentale et positive.

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